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Négociations pour un Traité sur le commerce
des armes (suite) : Entre échec et optimisme
Vendredi 27 juillet, la Conférence internationale de négociation d’un Traité sur le commerce des armes (TCA) qui se tenait aux Nations Unies (NU) depuis quatre semaines s’est terminée sans avoir adopté un traité. Les États concluaient ainsi leurs travaux sur un échec, eux qui avaient été mandatés pour adopter un texte juridique qui réglemente à l’échelle internationale les transferts d’armes conventionnelles entre États. Une grande majorité des délégations ne s’est toutefois pas affirmée vaincue et a tenu à exprimer son optimisme quant à la poursuite du processus pour l’adoption d’un TCA. Si l’on a encore envie d’y croire au vu de cet enthousiasme, l’avenir d’un pareil traité demeure incertain, plusieurs questions demeurant en suspens.
Alors que le projet de texte d’un traité présenté jeudi 26 juillet par le président de la Conférence, Garcia Moritan, avait suscité un certain optimisme sur les chances de parvenir à un accord, celui-ci a été rapidement mis à mal par les États-Unis le vendredi matin, soit le dernier jour de la Conférence. La délégation américaine a en effet rapidement annoncé que Washington n’était pas prêt à signer ce texte qui ne saurait, en l’état, réunir l’approbation du Sénat américain et que davantage de temps leur était nécessaire pour évaluer ce texte. Des négociations de haut niveau tenues en dernière minute ne sont pas parvenues à bout des réticences américaines, que l’on devine largement guidées par des préoccupations de politique strictement nationale (lobbying intense d’organisations telles que la National Rifle Association (NRA) à quelques mois des élections présidentielles américaines). Par ailleurs, d’autres États (la Russie, Cuba, la Corée du Nord, le Venezuela en tête) avaient profité de cette brèche ouverte par la délégation américaine pour clore la possibilité d’un accord, même de dernière minute, en réclamant eux aussi davantage de temps. Début d’après-midi, Moritan annonçait que son projet de traité serait simplement annexé au rapport de la Conférence, sans avoir été adopté - signifiant ainsi l’échec de la Conférence -, mais aussi sans donner plus d’indications quant à la suite du processus devant mener à l’adoption d’un TCA, en cours aux NU depuis 2006 (1).

Le texte du 26 juillet était loin d’être parfait ; il contenait de nombreuses lacunes. Il est vrai qu’il n’aurait pas permis de parvenir au texte exigé par les ONG mais aussi par de nombreux États pour mettre un terme aux souffrances humaines résultant des transferts d’armes et de la violence armée. Parmi celles-ci, il faut souligner : l’absence dans le texte proposé des munitions de gros calibre (les mortiers par exemple) ; l’absence des transferts tels que les dons ou cessions entre États ; l’absence des transferts de technologie et en particulier les autorisations de production d’armes sous licence étrangère ; une certaine graduation dans les critères proposés pour évaluer les demandes de transfert d’armes ; la possibilité d’apporter des amendements au traité mais par consensus uniquement ; ou encore une clause (exigée par l’Inde) selon laquelle le Traité ne portera pas préjudice aux obligations contractuelles des États relatives aux accords de coopération de défense, ce qui est en réalité la possibilité d’échapper aux dispositions du Traité.

Néanmoins, tout en reconnaissant ses imperfections, un très grand nombre d’États avait salué ce texte, l’acceptant comme une bonne base de négociation. Ils étaient prêts à négocier jusqu’au bout de la nuit si nécessaire pourvu qu’un accord soit le prix de ces efforts supplémentaires. Ils auraient peut-être pu y arriver si ce texte avait été présenté plus tôt durant la Conférence qui, pour rappel, avait débuté le 2 juillet (2).

Après la déclaration d’échec de la Conférence, un groupe de 90 États, dont les États de l’UE, de très nombreux États africains et d’Amérique latine et Caraïbes, a toutefois réaffirmé sa « déception mais pas son découragement » quant à la possibilité de parvenir dans les prochains mois à un TCA. Ils ont ainsi appelé à ce que le texte du 26 juillet soit transmis en l’état à l’Assemblée générale des Nations unies (AGNU) à la fin de l’année, souhaitant par-là garantir que le processus de négociation ne reprenne pas de zéro... lorsqu’il recommencera.

Car c’est là une des craintes à avoir. Au terme de cette conférence, rien n’a été décidé ni sur l’avenir de ce texte et son statut, ni sur la reprise des négociations sur un TCA. Si certains évoquent la possibilité d’un vote sur ce projet de texte à l’AGNU à la fin de l’année (et de facto un vote à la majorité qualifiée et non plus au consensus), d’aucuns ont déjà annoncé qu’ils s’y refuseraient. Les États-Unis ont ainsi déclaré (3) le soir même du 27 juillet qu’ils souhaitaient que l’AGNU décide d’étendre le mandat de la Conférence pour négocier un TCA, appelant ainsi à un « second tour des négociations », en 2013. Soit après les élections présidentielles américaines (une sérieuse épine dans le pied des négociateurs américains) et toujours sur la base du consensus.

L’objectif n’a donc pas été atteint, mais on en était proche. Certains États ont fait preuve de volonté et de compromis durant ces négociations, d’autres ont plutôt joué la carte du ralentissement des discussions et du manque de coopération, d’autres encore d’une real politik à toute épreuve au nom de leurs intérêts nationaux. Dans ces conditions, on peut considérer que le projet de texte du président dont nous disposons aujourd’hui (4) est un bon compromis bien qu’il soit effectivement perfectible. Il apparait essentiel de réunir tous les efforts nécessaires pour le sauvegarder au minimum en l’état et garantir que les négociations reprennent le plus tôt possible sur base de ce texte. L’enjeu est également de maintenir l’intérêt, voire l’enthousiasme, de nombreux États envers ce projet de traité international qui permettra d’universaliser la réglementation des transferts d’armes et lutter ainsi un peu plus contre les trafiquants d’armes et les transferts irresponsables d’armes, tout en reconnaissant enfin l’enjeu « humain » de ce commerce.

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Contact : Virginie MOREAU, +32.2.240.11.06, v.moreau@grip.org



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